Actualité - Cancers du sein

Un hypo-fractionnement extrême pour le cancer du sein

06/12/2021
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Les médecins de l’Institut Curie développent une approche de baisse drastique du nombre de séances de radiothérapie pour des patientes porteuses de cancers du sein sans risque élevé de récidive. Objectif : réduire le poids de la radiothérapie tout en assurant son efficacité thérapeutique.

 Portrait Dr Youlia Kirova

La radiothérapie hypo-fractionnée résulte d’une double tradition à l’Institut Curie. D’une part l’utilisation des rayonnements ionisants pour attaquer les tumeurs découle directement des travaux de la famille Curie. D’autre part, cette approche, qui consiste à alléger le nombre de séances pour simplifier l’accès du traitement aux patients, est développée depuis plus de 50 ans à l’Institut. Le protocole classique présente 25 séances de radiothérapie, mais il est possible, pour certains patients, de ne faire que 15 séances en 3 semaines. C’est l’hypo-fractionnement. Aujourd’hui, la recherche progresse dans cette direction. Des médecins chercheurs de l’Institut Curie, menés par le Dr Youlia Kirova, médecin oncologue et radiothérapeute, proposent ainsi à des patientes sans risque élevé de récidive, un hypo-fractionnement extrême de la radiothérapie contre les cancers du sein, c’est-à-dire de réaliser tout le traitement ionisant en seulement 5 jours, à raison d’une séance par jour (1, 2).

Repousser encore l’hypo-fractionnement

Des médecins du groupe anglais FAST ont montré qu’il était possible, chez des patientes sans risque de récidive, de réduire le protocole à 5 semaines, avec une séance par semaine.

Précise l’oncologue radiothérapeute.  Avec ses collaborateurs, elle a étudié cette approche et a encore concentré le temps de traitement avec un schéma de 5 séances sur 1 semaine. Dans leur étude « FAST Forward » parue en 2020, les chercheurs de Curie présentent des données comparables au protocole en 15 séances et 3 semaines, avec un recul de 5 ans(1).

En pratique, nous administrons à chaque séance une dose un peu plus forte qu’avec le schéma hypo-fractionné classique, mais la dose totale de rayons, cumulée au fil des 5 séances, est plus faible.

Explique Youlia Kirova. Avec un recul de 5 ans ce schéma d’irradiation, appelé « FAST Forward » a montré une efficacité égale à l’hypo-fractionnement en 15 fractions et 3 semaines dans une étude contrôlée de phase III incluant plus de 4000 patientes (1). L’objectif de cette approche est de conserver le même résultat thérapeutique en réduisant l’impact du traitement sur la vie des patientes.

Au bénéfice de la qualité de vie

Pour l’instant, ce protocole s’adresse à des patientes de plus de 70 ans, sans risque élevé de récidive. Elles ont une vie active, s’occupent des petits enfants… C’est un réel bénéfice pour elles de pouvoir être traitées en seulement une semaine.

Ces patientes sont soignées par radiothérapies après une chirurgie conservatrice du sein. Seules les patientes sans atteinte ganglionnaire peuvent bénéficier de ce régime d’hypo-fractionnement extrême.

L’Institut Curie est pionnier en la matière.

Précise Youlia Kirova et les résultats de premières patientes traitées sont déjà publiées (2).

D’autres centres en France développent cette approche. Le cumul de ces expériences permettra de mieux évaluer cet hypo-fractionnement extrême de la radiothérapie dans le cancer du sein et d’en préciser l’effet sur le plus long terme ; des données indispensables pour envisager de le proposer à d’autres populations de patientes.

 

(1) Brunt AM, Haviland JS, Wheatley DA, Sydenham MA, Alhasso A, Bloomfield DJ, et al. Hypofractionated breast radiotherapy for 1 week versus 3 weeks (FAST-Forward): 5-year efficacy and late normal tissue effects results from a multicentre, non-inferiority, randomised, phase 3 trial. The Lancet [Internet]. 23 mai 2020

 (2) Chaffai I, Cao K, Kissel M, El Ayachy R, Aboudaram A, Fourquet A, Kirova Y. : Patient selection and early tolerance of whole breast irradiation according to the "Fast Forward" protocol: Preliminary results]. Cancer Radiother. 2021:S1278-3218(21)00192-X. doi: 10.1016/j.canrad.2021.07.036. Online ahead of print. PMID: 34454837 French.