Un nouvel allié contre le cancer : les bactéries de notre intestin
100 000 milliards, tel serait le nombre de bactéries vivantes dans nos intestins. Indispensables à l’assimilation des aliments, ces bactéries vivent en parfaite harmonie avec leur hôte. Cette symbiose va même plus loin. "On savait déjà que le microbiote jouait un rôle critique pour le fonctionnement du système immunitaire. Désormais les preuves s’accumulent en faveur d’un rôle du microbiote lors de la réponse aux immunothérapies chez les patients, explique Eliane Piaggio, directeur de recherche Inserm, chef de l'équipe de recherche Immunothérapie Translationnelle (SIRIC, Institut Curie) et coordinatrice du PIC3i dédié à la flore intestinale. Il a d’ailleurs été récemment montré qu’en l’absence de microbiote, certaines immunothérapies ne présentent plus aucune efficacité chez des souris atteintes de tumeur." Ces études ont été réalisées avec les dernières nées des immunothérapies, les immunomodulateurs. Il s’agit d’anticorps qui ciblent PD-1 ou CTLA-4, des molécules présentes à la surface des lymphocytes T. Leur but : débloquer les mécanismes empêchant les lymphocytes T de s’attaquer aux cellules tumorales.
Accroître l’efficacité des immunothérapies
Rien qu’à l’Institut Curie, une dizaine d'essais cliniques d’immunothérapie sont actuellement en cours avec ces immunomodulateurs. Très prometteuse, cette nouvelle classe thérapeutique a fait preuve d’efficacité chez 10 % à 40 % des patients atteints de certains types de cancers. Médecins et chercheurs veulent donc comprendre pourquoi certains patients ne répondent pas. "Les yeux se tournent de plus en plus vers le microbiote pour trouver des explications à ce dilemme, enchérit Eliane Piaggio. Grâce au laboratoire d’investigation préclinique, dirigé par Didier Decaudin, et à la collaboration avec Romina Goldszmid du NIH aux Etats-Unis, nous allons développer des modèles animaux de tumeurs du sein pour étudier la contribution du microbiote à la réponse aux immunomodulateurs. Notre objectif est d’identifier des familles de bactéries qui stimuleraient ou inhiberaient l’effet de ces immunothérapies." En effet, les espoirs et les attentes sont nombreux vis-à-vis des immunothérapies. Certes, il faut encore améliorer les traitements et identifier des biomarqueurs pour anticiper les réponses au traitement. Leur développement passe par une meilleure compréhension de leur mode d’action, mais aussi de l’effet cumulé avec d’autres thérapies comme la chimiothérapie ou les thérapies ciblées. L’avenir de la cancérologie résidera très certainement dans la combinaison de plusieurs approches : immunomodulateurs, thérapies ciblées, approches vaccinales, chimiothérapies...
Coordinateur
- Eliane Piaggio, directeur de recherche Inserm, chef de l'équipe de recherche Immunothérapie Translationnelle (SIRIC, Institut Curie)
Partenaires
- Didier Decaudin, responsable du Laboratoire d’Investigation Préclinique.
- Romina Goldszmid, National Institute of Health /National Cancer Institute, Center for Cancer Research; Bethesda