La protonthérapie à l’Institut Curie

La protonthérapie à l’Institut Curie

Qu’est-ce que la protonthérapie ? 

La protonthérapie est une forme de radiothérapie ultraprécise, utilisée pour traiter certains cancers de l’adulte et de l’enfant. Le centre de protonthérapie de l’Institut Curie, sur le site d’Orsay, en Essonne, se place au troisième rang mondial en nombre global de patients traités, et est le premier en nombre de patients traités pour des tumeurs ophtalmiques. En France, seuls trois sites proposent cette option thérapeutique : Orsay (Institut Curie), Nice et Caen.

Contrairement à la radiothérapie classique, qui utilise des faisceaux de photons pour irradier et détruire les cellules cancéreuses, la protonthérapie a recours à des faisceaux de protons. Les protons ont deux avantages majeurs : 

  • Ils traversent le corps pour déposer quasiment toute leur énergie à une profondeur donnée (là où se situe la tumeur), sans aller au-delà. La tumeur reçoit donc un pic d’irradiation très important, tandis que les tissus sains situés en amont et derrière elle sont très peu touchés. 
  • Ils suivent une trajectoire relativement droite et se dispersent peu sur les côtés (faible diffusion latérale). Les tissus sains situés autour de la tumeur sont ainsi épargnés. 

Grâce à ce ciblage très précis et sélectif du volume tumoral, la protonthérapie permet d’augmenter la dose délivrée à la tumeur, et ainsi de renforcer l’efficacité du traitement, tout en préservant les tissus sains adjacents. 

La protonthérapie est donc une méthode de choix pour traiter les tumeurs radio-résistantes, qui nécessitent de plus fortes doses de rayonnements, ou celles qui se trouvent à proximité d’organes sensibles (nerf optique, cerveau, moelle épinière…). Par ailleurs, du fait d’une diminution de la dose intégrale – dose totale d’irradiation reçue par le patient dans la tumeur mais aussi dans le reste du corps –, ce traitement est privilégié chez les enfants, les adolescents et les jeunes adultes, qui sont les plus à risque de développer des cancers secondaires radio-induits. 

La diminution de l’exposition des tissus sains à l’irradiation, permise par la protonthérapie, réduit significativement l’apparition d’effets secondaires et le risque de complications. Cependant, malgré son ultraprécision, la protonthérapie peut tout de même induire dans certains cas des effets secondaires et des complications identiques à ceux de la radiothérapie par photons.

Les indications de la protonthérapie 

Les indications reconnues de la protonthérapie en France sont les tumeurs de l’œil (mélanomes de la choroïde), les chordomes et chondrosarcomes de la tête et du rachis (colonne vertébrale) ainsi que les tumeurs pédiatriques. 

Depuis 2017, grâce à la mise en place d’une nouvelle technique d’irradiation en protonthérapie baptisée PBS-IMPT (Pencil Beam Scanning - Intensity Modulated Proton Therapy ou irradiation par modulation d’intensité), l’Institut Curie est en mesure de réaliser de l’irradiation cranio-spinale (au niveau de l’ensemble du crâne et de la moelle épinière) pour traiter des tumeurs de la base du crâne comme le médulloblastome de l’enfant ou de l’adulte, ou certaines tumeurs du cerveau. À ce jour, c’est le seul centre en France à proposer ce type d’irradiation. Le PBS-IMPT permet aussi de traiter les localisations thoraciques des lymphomes de Hodgkin de l’enfant et du jeune adulte, tout en épargnant les organes à risque situés à proximité tels que les seins. Chez les jeunes femmes, la protonthérapie limite ainsi le risque de cancer du sein secondaire radio-induit. 

Que ce soit pour les cancers de l’adulte ou pédiatriques, les indications thérapeutiques de la protonthérapie tendent à s’élargir. De nombreux essais cliniques sont en cours pour évaluer les bénéfices de la protonthérapie dans de nouvelles indications (poumon, cerveau, ORL, sein, œsophage, pancréas, foie…).

L’expertise Curie 

Le centre de protonthérapie de l’Institut Curie dispose de trois salles de traitement alimentées par un même accélérateur de particules (le cyclotron) : 

  • Une salle dédiée au traitement des tumeurs ophtalmiques : tumeurs oculaires ou conjonctivales. Le mélanome de l’œil reste le cancer le plus fréquemment traité par protonthérapie à l’Institut Curie. 
  • Une salle dédiée au traitement des tumeurs de la tête (crâne et cerveau) 
  • Une salle équipée d’un bras rotatif (Gantry) permettant de délivrer les faisceaux de protons tout autour du patient sur 360° et ainsi d’atteindre des tumeurs inaccessibles avec les équipements des autres salles. Tous les types de tumeurs peuvent ainsi être traités dans cette salle (crâne, intracrânien, orbite, thorax, abdomen, pelvis, rachis, etc.). Cette salle permet aussi d’améliorer la distribution de la dose sur la tumeur grâce à la technologie PBS (Pencil Beam Scanning), qui consiste à balayer tout le volume de la tumeur point par point à l’aide de microfaisceaux, en faisant varier leur énergie pour atteindre des profondeurs différentes. En effet, la tumeur peut avoir une forme complexe, alternant des zones concaves et convexes, et les profondeurs ciblées lors du balayage doivent suivre l’anatomie du volume tumoral. L’IMPT (irradiation par modulation d’intensité), une technique d’irradiation qui complète le PBS, permet d’optimiser ces distributions de dose non uniformes en profondeur pour chaque faisceau du traitement. La plupart des tumeurs pédiatriques sont traitées dans cette salle.

La prise en charge en protonthérapie 

La prise en charge en protonthérapie est globalement identique à celle en radiothérapie par photons. Après une première consultation avec l’oncologue radiothérapeute, un scanner en position de traitement est réalisé pour effectuer le contourage (reconstruction en 3D du volume tumoral à irradier) et la dosimétrie (répartition de la dose à administrer au niveau de la zone tumorale). En ophtalmologie, une petite chirurgie sous anesthésie locale ou générale est requise pour poser des clips en tantale dans l’œil, qui serviront de repères pour irradier précisément la tumeur lors des séances de protonthérapie. 

À chaque début de séance de protonthérapie, le patient est repositionné exactement de la même manière que lors du scanner de préparation, grâce à l’imagerie. Des systèmes de contention sont aussi utilisés pour le maintenir immobile dans la position de traitement. Pour éviter qu’ils ne bougent, les enfants de moins de cinq ans sont quant à eux systématiquement anesthésiés. 

Entre 30 et 40 séances de protonthérapie sont généralement nécessaires pour les patients adultes (et environ 30 séances pour les enfants), à raison d’une séance par jour, cinq fois pas semaine (du lundi au vendredi). Il faut compter entre 15 et 20 minutes pour chaque séance de protonthérapie (30 minutes pour les enfants endormis). En ophtalmologie, seules quatre séances de protonthérapie sont requises.

La recherche en protonthérapie 

Au-delà des soins courants, l’Institut Curie dispose d’un centre de recherche en protonthérapie doté d’une forte expertise. 

La recherche de pointe menée à l’Institut Curie ouvre la voie à des traitements novateurs en protonthérapie. La radiothérapie par mini-faisceaux de protons (pMBRT), basée sur un fractionnement spatial de la dose, avec des régions alternées de doses élevées et faibles, suscite de nombreux espoirs pour le traitement des tumeurs radio-résistantes tout en renforçant la protection des tissus sains. 

La radiothérapie Flash, une technique de radiothérapie découverte dans les laboratoires de l’Institut Curie en 2014, et qui consiste à administrer une forte dose de radiation (électrons ou protons) en une fraction de seconde, est également très prometteuse. 

Par ailleurs, plusieurs protocoles de recherche clinique en protonthérapie sont accessibles aux patients traités à l’Institut Curie pour différents cancers (méningiomes, œsophages).