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Une nouvelle méthode de microfluidique pour étudier l’épigénétique en cellule unique

07/06/2019
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Des chercheurs de l’Institut Curie allient leurs compétences à celles d’une équipe de l’ESPCI et de la compagnie HiFiBiO pour identifier, cellule par cellule, la signature épigénétique des cellules résistantes aux traitements anti-cancéreux. Une nouvelle avancée qui leur vaut une publication dans Nature Genetics.

Céline Vallot

La microfluidique est une technique qui permet des analyses en cellule unique, c’est-à-dire de faire parler les cellules une à une, plutôt que d’observer le comportement moyen d’une grande population de cellules. C’est ainsi, en isolant des cellules individualisées dans des microgouttelettes, que les chercheurs découvrent peu à peu l’hétérogénéité au sein des cellules qui composent une tumeur. Après des révélations sur des différences génétiques entre différentes cellules, ils passent maintenant à un autre niveau : l’observation de différences épigénétiques, c’est-à-dire non plus dans la composition de l’ADN mais dans la manière dont il s’organise.

Cette étude est bien plus complexe que celle de l’ARN (ce dérivé de l’ADN qui permet l’étude de l’expression des gènes). C’est pourquoi les chercheurs de l’Institut Curie ont collaboré avec Andrew Griffiths et son équipe de l’ESPCI, École supérieure de physique et de chimie industrielle de Paris, et avec Annabelle Gérard chez HiFiBio, société spécialiste de la microfluidique. Ces experts des techniques de microfluidique se sont donc associés avec l’équipe de Céline Vallot, spécialiste de l’analyse de données à l’Institut Curie.

La microfluidique est déjà une technique de pointe au service de la biologie moléculaire. Ensemble, ces chercheurs l’ont poussée un cran plus loin. En effet, Kevin Grosselin étudiant en thèse à l’ESPCI et HiFiBiO, a mis au point la technique applicable à l’épigénétique : « une technique en trois étapes, différente et plus complexe que la microfluidique habituelle qui étudie l’expression des gènes », commente Céline Vallot. De son côté, elle a mobilisé son savoir-faire en analyse de données : « Dans cette technique, les données recueillies sont très éparses, il y a beaucoup de « trous », des gènes pour lesquels on n’a pas ou peu d’informations. Le traitement des données permet alors d’en extraire les informations pertinentes et de répondre à nos questions biologiques ». Grâce à une collaboration et avec Elisabetta Marangoni et son équipe d’investigation préclinique à l’Institut Curie, les chercheurs ont pu étudier les cartes épigénétiques dans des cas de résistance à la chimiothérapie et l’hormonothérapie.

C’est ainsi qu’ils ont pu mettre en évidence des sous-clones épigénétiques, c’est-à-dire, parmi les cellules d’une tumeur, des groupes de cellules qui ont des caractéristiques identiques entre elles mais différentes des autres d’un point de vue épigénétique. « On a observé des cartes d’identité épigénétiques hétérogènes au sein des tumeurs sensibles, explique Céline Vallot. Cela pourrait expliquer les résistances au traitement de certaines tumeurs. Désormais, grâce à cette collaboration, l’Institut Curie s’est équipé de cette nouvelle technique de microfluidique, qui pourrait nous permettre d’identifier une sous-population de cellules, qui ne représentent peut-être que 16 % des cellules d’une tumeur, mais qui pourraient être déterminantes dans l’acquisition de la résistance. »

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