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Espoir autour d'une nouvelle stratégie thérapeutique dans le cancer du sein triple négatif

20/02/2020
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Etre prêt à proposer le meilleur traitement à une patiente, avant même l’apparition d’une récidive de son cancer, c’est l’ambition du projet d’Elisabetta Marangoni qui vient de recevoir une aide de 150 000 euros issus de la générosité du public.

Elisabetta Marangoni

Les cancers du sein triple négatifs, très agressifs, représentent environ 15 à 20% des cancers du sein. Ils possèdent la particularité de ne pas avoir de récepteurs hormonaux et donc ne peuvent pas être traités par thérapie hormonale. En plus de la chirurgie et la radiothérapie, la chimiothérapie représente le traitement principal de ce type de cancer du sein.

De nouvelles pistes de traitement pourraient bientôt voir le jour d’après les recherches issues d’une collaboration entre plusieurs équipes de la recherche et de l’hôpital de l’Institut Curie et une équipe du National Cancer Institute (NCI-NIH, basé aux Etats-Unis). Elisabetta Marangoni a initié et coordonné ce travail pluridisciplinaire, publié dans la revue Science Translational Medicine.

Au cœur des travaux : l’irinotécan, une chimiothérapie qui cible l’enzyme topoisomerase I et dont l’efficacité est étroitement liée à l’incapacité des tumeurs à réparer les dommages de l’ADN. L’irinotecan est utilisé pour soigner des patients atteints de cancers du poumon ou colorectaux, mais pas pour les patientes atteintes d’un cancer du sein. « Notre hypothèse était que les cancers du sein triple-négatifs pourraient répondre favorablement à cette chimiothérapie du fait d’un défaut de réparation important et fréquent dans cette catégorie de cancers du sein. »

L’équipe de Elisabetta Marangoni, au département de recherche translationnelle de l’Institut Curie, a donc testé l’irinotécan sur 40 xénogreffes issues de tumeurs de patientes, appelées PDX (patient derived xenograft). Un modèle préclinique élaboré à l’Institut Curie et proche de la clinique.

Les nouveaux résultats démontrent que sur les 40 tumeurs testées, un tiers a répondu avec disparition ou régression importante de la tumeur et un tiers avec une stabilisation de la masse cancéreuse.

Dans un deuxième temps, l’équipe a cherché des biomarqueurs prédictifs de réponse afin de pouvoir identifier les patientes qui seront susceptibles de répondre à ce traitement en clinique. L’équipe de Marc-Henri Stern a développé une signature moléculaire pour détecter la BRCAness, qui est à l’origine des défauts de réparation de l’ADN. « On a trouvé que les tumeurs avec BRCAness ont une meilleure chance de répondre à l’irinotecan. »

En analysant l’expression des gènes dans les tumeurs sensibles, deux autres biomarqueurs ont également été identifiés, le gène Schlafen 11 (SLFN11), plus fortement exprimé dans les tumeurs sensibles, et le gène RB1 (Retinoblastoma), moins exprimé.

Les équipes ont ensuite combiné les trois marqueurs et découvert que leur association permet d’identifier les tumeurs qui répondent le mieux. « Ces trois biomarqueurs sont faciles à tester dans la pratique clinique », se réjouit Elisabetta Marangoni. 

Enfin, l’équipe a testé une nouvelle classe de chimiothérapie avec le même mécanisme d’action que l’irinotécan, mais avec moins d’effets secondaires. Ces nouvelles chimiothérapies, appelées indotecan et indimitecan, ont été développées par Yves Pommier au National Cancer Institute. Les tests effectués avec ces nouveaux médicaments anti-cancéreux se sont avérés très positifs. Ils ouvrent la voie à des essais cliniques chez les patientes avec un cancer du sein triple-négatif.