Actualité - Cancers pédiatriques

La plastique des tumeurs d’Ewing dévoilée

02/03/2017
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A l'occasion de la Journée internationale du cancer de l'enfant, le 15 février 2017, retour sur les récentes découvertes scientifiques de l’équipe Génétique et biologie des tumeurs pédiatriques (Institut Curie/Inserm). Les biologistes sont parvenus à préciser la plasticité des mécanismes cellulaires qui interviennent dans les tumeurs d’Ewing.

Publication Nature Oncogene O. Delatte 30.01.17

Les cancers pédiatriques sont la seconde cause de mortalité des enfants dans les pays développés. L’équipe dirigée par Olivier Delattre travaille plus spécialement sur les sarcomes d’Ewing, tumeurs osseuses de l’enfant, souvent agressives.

En 1992, l’équipe d’immunologistes de l’Institut Curie a découvert le gène dont l’anomalie est à l’origine de ces tumeurs. La poursuite des travaux a permis d’en préciser l’origine, due à une altération fondatrice qui fusionne deux gènes cellulaires et aboutit à la synthèse d’une protéine anormale, EWSR1-FLI1, non présente dans des cellules saines. Plus récemment, l’équipe a démontré que la fixation de cette protéine active certains gènes et participe au développement des tumeurs d’Ewing.

La piste de la stabilité protéique

L’équipe concentre désormais ses recherches à comprendre les fonctions de la protéine EWSR1-FLI1. Quels sont en particulier les mécanismes qui influent sur sa quantité intracellulaire ? Sa synthèse et sa dégradation sont-elles étroitement régulées ou sont-elles le résultat de processus stochastiques ? L’équipe cherche à y répondre en analysant la plasticité des mécanismes cellulaires et épigénétiques.

Les cellules malignes fluctuent entre deux états, soit une concentration élevée de la protéine EWSR1-FLI1, soit plus faible. Ces deux configurations de la cellule ont des impacts différents sur le processus métastasique. Les cellules à la concentration élevée adhèrent entre elles : elles prolifèrent et forment des masses tumorales compactes. En revanche, celles contenant une quantité plus faible montrent une adhésion entre cellules moindres et une faculté à migrer et à se déplacer. Ces cellules présentent un potentiel d’invasion et d’expansion. La cellule peut fluctuer entre ces deux états. Cette découverte apporte un nouveau modèle reliant la quantité de la protéine oncogène au sein de la cellule au phénotype de celle-ci. Elle a fait l’objet d’une publication dans la prestigieuse revue Nature Oncogene, parue le 30 janvier 2017.   

Du point de vue épigénétique

D’autre part, l’équipe Génétique et biologie des tumeurs pédiatriques collabore avec le Centre de Recherche de Médecine Moléculaire de Vienne, Autriche (CeMM) pour étudier l’expression de la protéine EWSR1-FLI1 avec une approche épigénétique.

La méthylation est un procédé génétique qui permet à la cellule de réprimer certains gènes en rendant inaccessibles spatialement certaines parties de son ADN. Les chercheurs ont analysé la relation entre ce phénomène et l’activation du gène responsable de la synthèse de la protéine anormale EWSR1-FLI1.

Cette étude quantitative sur des tumeurs a permis de préciser les positions épigénétiques favorables à l’apparition des tumeurs d’Ewing. Cette collaboration internationale a permis de collecter un nombre important d’échantillons de cette tumeur rare et d’associer des expertises scientifiques diverses. Ce travail met en lumière d’une part le rôle déterminant de la protéine EWSR1-FLI1 sur l’empreinte épigénétique et d’autre part l’hétérogénéité de cette empreinte d’une cellule à l’autre au sein d’une même tumeur qui pourrait rendre compte de la plasticité phénotypique de ces cellules.