Actualité - Immunothérapie

Nouvel essai clinique : vers des immunothérapies adaptées

23/06/2016
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Déjà fort prometteuse, l’immunothérapie a encore beaucoup à nous apporter et son futur se construit dès aujourd’hui. C’est dans cette optique qu’a été conçu le nouvel essai lancé par l’Institut Curie. Son objectif : identifier des néo-épitopes, premier pas vers des immunothérapies personnalisées.

Dr Delphine Loirat /  Centre d’immunothérapie

Dr Delphine Loirat, oncologue médicale, spécialiste des essais clinique en immunothérapie, porteur du projet Centre d’immunothérapie, à l'Institut Curie, Paris.

Qu’ils soient préventifs ou thérapeutiques, les vaccins contre le cancer reposent sur l’éducation du système immunitaire. Première étape : identifier un facteur qui va lui apprendre à reconnaître le danger à éliminer. "Or, les cellules tumorales sont des cellules du soi, devenues incontrôlables, explique le Dr Delphine Loirat. Toute la difficulté est donc de cibler une attaque sur elles sans détruire les tissus sains dont elles sont originaires." Le Graal de la vaccinothérapie contre le cancer consiste à identifier un facteur suffisamment spécifique de la tumeur pour provoquer une réaction immunitaire efficace, mais n’entraînant pas ou peu de dommages sur les tissus proches biologiquement.

Cibler les tumeurs

Vacciner, c’est activer les lymphocytes T pour qu’ils détruisent un ennemi. Pour cela il faut leur présenter un fragment de l’ennemi, le plus souvent un bout représentatif d’une protéine, elle-même spécifique du pathogène ou des cellules tumorales à éliminer. Appelé épitope, ce chiffon rouge va lancer les lymphocytes T sur la piste des cellules dangereuses. Dans une cellule tumorale, cet épitope peut prendre plusieurs formes. "N’importe quel fragment de protéines peut en quelque sorte jouer ce jeu, précise l’immunologiste. Tout l’art va consister à en trouver un propre à la tumeur, issu d’une mutation d’un gène spécifique de la cellule tumorale (en effet les cellules tumorales ont pour caractéristique d’accumuler de nombreuses mutations au sein de leur génome). C’est ce que les immunologistes appellent un néo-épitope." Leur identification est l’une des conditions pour induire une réponse ciblée et efficace contre les tumeurs. C’est l’objet de l’essai clinique que Delphine Loirat et Eliane Piaggio, toutes deux responsables de l'équipe de recherche Immunothérapie translationnelle (TransIm) (SIRIC, Institut Curie) ont lancé fin mai 2016. Sans bénéfice direct pour les patients impliqués, cet essai vise à déterminer la faisabilité d’identifier ces néo-épitopes à partir des cellules tumorales envahissant les ganglions et de rechercher dans le sang, dans les ganglions et dans la tumeur des  lymphocytes T reconnaissant ces néo-épitopes. Jusqu’à présent, les néo-épitopes étaient "déduits" à l’aide d’algorithmes informatiques se basant sur les mutations présentes dans les tumeurs. "Grâce à la collaboration d’autres spécialistes de l’Institut Curie et notamment de chirurgiens, nous allons pouvoir prospecter dans les ganglions envahis  par les cellules tumorales de 20 patientes atteintes de cancer du sein et de 20 patients atteints de mélanome de la peau la présence de néo-épitopes." C’est un réel espoir pour le développement des vaccins contre le cancer. Car les néo-épitopes rendent possible la mise au point de vaccins adaptés à chaque patient, suffisamment spécifiques pour induire une réponse contre la tumeur avec  peu de toxicité pour les tissus sains. Avec les néo-épitopes s’ouvre la voie des immunothérapies individualisées, ou personnalisées.