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- Cancer du sein triple-négatif : Premières patientes incluses dans un essai clinique à l’Institut Curie
Les premières patientes viennent d’être incluses dans cette étude clinique innovante et prometteuse, co-construite par les cliniciens et les chercheurs, qui s’inscrit dans le projet IHU « Institut des cancers des femmes » fondé par l’Institut Curie avec l’Université PSL et l’Inserm.
Baptisée Skyline, cette étude va inclure 160 femmes atteintes de cancer du sein triple-négatif : 80 en phase précoce (sans métastases) et 80 étant en situation métastatique.
Le volet diagnostique utilise une méthode innovante et inédite en France : celle de l’imagerie par TEP-scan corps entier avec un nouveau radiotraceur FAPI (détectant les fibroblastes associés au cancer surexprimant la protéine FAP). Toutes les patientes de l’étude bénéficieront de ce nouveau type d’examen d’imagerie pour la détection et la caractérisation de leur maladie.
Nous espérons que ce nouvel outil diagnostique montrera une sensibilité supérieure au TEP-scan classique et permettra de détecter la présence de métastases et d’évaluer plus précisément la taille de la tumeur. FAPI est un radiotraceur qui détecte une population particulière de cellules, les fibroblastes FAP+, très abondantes dans les tumeurs agressives, impliquées dans la propagation métastatique et les résistances aux immunothérapies. Issu des recherches que nous menons depuis 15 ans à l’Institut Curie sur ces fibroblastes FAP+, ce nouveau radiotraceur est utilisé pour la première fois en France.
Souligne le Dr Fatima Mechta-Grigoriou, cheffe de l’équipe « Stress et Cancer » à l’Institut Curie et coordinatrice du RHU CASSIOPEIA [1].
L’espoir est évidemment de montrer que ce nouvel examen d’imagerie, non invasif, précise au mieux l’extension tumorale, voire qu’il soit prédictif de l’efficacité des traitements chez les patientes atteintes de cancer du sein triple-négatif.
Précise le Pr François-Clément Bidard, oncologue médical à l’Institut Curie et investigateur principal de l’essai clinique Skyline[2].
Le volet thérapeutique de l’étude, mené en partenariat avec Roche et l’Institut Roche, va associer deux immunothérapies destinées à « déverrouiller » le système immunitaire en ciblant 2 mécanismes différents mais complémentaires, PD-L1 et TIGIT, par l’atezolizumab et le tiragolumab, en plus de la chimiothérapie et avant la chirurgie (pour les patientes sans métastases). Il s’agit d’un essai de phase II qui évaluera, chez toutes les patientes de l’étude, l’activité anti-tumorale de ce nouveau traitement (réponse et survie).
En libérant certaines capacités du système immunitaire, l’immunothérapie est un traitement des maladies métastatiques qui a fait ses preuves. Cependant de nombreuses patientes n’en tirent pas un bénéfice durable car le cancer joue sur de nombreux mécanismes d’action pour échapper au traitement. En associant ces deux immunothérapies, nous espérons lever les freins du système immunitaire et favoriser son action anti-tumorale pour obtenir une réponse thérapeutique et une meilleure survie.
Explique le Pr François-Clément Bidard.
L’essai, ouvert à l’Institut Curie sur les deux sites hospitaliers, est coordonné à Paris par le Dr Florence Coussy, et à Saint-Cloud par le Dr Diana Bello-Roufai, toutes deux médecins du département d’Oncologie médicale. Les premiers résultats de Skyline sont attendus dans 3 ans et les résultats complets d’ici 5 ans.
[1] Directrice de recherche classe exceptionnelle à l’Inserm, elle est également directrice adjointe de l’unité Cancer, hétérogénéité, instabilité et plasticité (Inserm U830 / Institut Curie)
[2] Il est également responsable du groupe de recherche translationnelle Biomarqueurs tumoraux circulants de l’Institut Curie et professeur de l’Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines / Université Paris-Saclay.
Cet essai clinique est une étape clé du programme de Recherche Hospitalo-Universitaire en santé RHU CASSIOPEIA coordonné à l’Institut Curie par le Dr Fatima Mechta-Grigoriou.
Obtenu en 2021, ce RHU CASSIOPEIA (ANR-21-RHUS-0002) bénéficie d’une aide de l'Etat Français gérée par l'Agence Nationale de la Recherche (ANR) au titre du Programme d’Investissements d’Avenir (PIA) France 2030.
En collaboration entre l’Institut Curie, Roche et l’Institut Roche, le projet CASSIOPEIA, tant fondamental que clinique, vise à mieux comprendre les cancers du sein triple-négatifs, notamment leur hétérogénéité afin d’identifier dès le diagnostic les patientes qui pourraient développer des résistances au traitement.
Les équipes vont évaluer de nouveaux procédés de détection des métastases et des récidives précoces.
L'ambition est de développer des thérapies inédites ayant pour cible les fibroblastes impliqués dans les résistances aux immunothérapies, un type cellulaire très abondant dans les tumeurs agressives, et pourtant non encore ciblé sur le plan thérapeutique.
Les cancers du sein triple-négatifs
Parmi les 61 000 nouveaux cas de cancer du sein diagnostiqués chaque année en France, le cancer du sein triple-négatif affecte environ 15% des patientes,
Non sensible aux traitements hormonaux, ni aux thérapies ciblées anti-HER2, il est l’un des cancers du sein les plus agressifs et les plus difficiles à traiter.
Il est souvent diagnostiqué chez des femmes plus jeunes (40% ont moins de 40 ans), avec un risque plus élevé de récidive métastatique précoce et une survie globale plus courte par rapport aux autres sous-types de cancer du sein.
Le traitement standard est actuellement une chimiothérapie pouvant être associée à une immunothérapie, et suivies d’une chirurgie pour les patientes en phase précoce (sans métastases).
Les défis les plus importants sont :
- détection et cartographie du cancer et de ses métastases,
- meilleure prédiction de l'efficacité et de la résistance à l'immunothérapie,
- développement de nouvelles options thérapeutiques.
Source INCa 2023
Les fibroblastes au cœur d’un nouvel essai clinique
L’équipe dirigée par le Dr Fatima Mechta-Grigoriou s’intéresse depuis 15 ans à une population cellulaire spécifique : les fibroblastes, des cellules présentes dans l’ensemble de l’organisme au niveau des tissus conjonctifs.
Activés par des signaux émis notamment par les cellules tumorales, les "fibroblastes associés au cancer" (CAF) constituent une population très abondante au cœur des tumeurs, se mélangeant avec les cellules tumorales. Ils sont très hétérogènes et certains types particuliers de fibroblastes sont un moteur important dans le développement de la maladie, par exemple en favorisant la propagation de métastases et la résistance aux immunothérapies. Comprendre le rôle et l’évolution des CAF pendant la maladie et le ciblage spécifique des fibroblastes délétères est donc essentiel pour trouver de nouvelles approches thérapeutiques plus efficaces contre les cancers.
« Nos travaux ont mis en évidence que certains fibroblastes interagissent avec les cellules immunitaires et inhibent leur action anti-tumorale. Dans ce cas, le système immunitaire ne fonctionne plus et l’immunothérapie ne peut plus être efficace », explique le Dr Fatima Mechta-Grigoriou.
L’accumulation de ces CAF entraine une cascade de réactions qui aboutit à l’inhibition de l’activité anti-tumorale du système immunitaire, et est associée à la résistance chez les patients aux anticorps qui ciblent la voie de signalisation PD1/PD-L1, très utilisée en immunothérapie. Ces molécules chargées de stimuler le système immunitaire pour qu’il s’attaque aux cellules cancéreuses, sont bloquées par ces CAF.
« Ce qui est particulièrement réjouissant, c’est que grâce à des travaux mettant en jeu des équipes interdisciplinaires de médecins, biologistes, bioinformaticiens et mathématiciens, sur des problématiques complexes, nous avons réussi à obtenir un résultat qui est cliniquement adaptable, avec, nous l’espérons, un bénéfice réel pour les patientes » conclut le Dr Fatima Mechta-Grigoriou.
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