Actualité - Mélanomes de l’uvée

L’AMCC combat le rétinoblastome en Afrique

13/07/2016
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En France, le rétinoblastome, une tumeur de l’œil de l’enfant, se soigne très bien, avec un taux de guérison supérieur à 98 %. En Afrique, la situation est toute autre : c’est ce qui a poussé le Pr Pierre Bey, ancien directeur de l’hôpital de l’Institut Curie, à développer un réseau d’experts dans cinq pays sub-sahariens. A ses côtés, le Dr Laurence Desjardins, spécialiste du rétinoblastome.

 Laurence Desjardins

Lorsque Pierre Bey m’a parlé de son projet de former des médecins africains aux problématiques du rétinoblastome, je n’ai pas eu besoin de réfléchir, j’ai accepté tout de suite, se souvient le Dr Laurence Desjardins. L’idée que des enfants meurent d’une maladie qui, ici, se soigne bien, c’est insupportable."

Tout commence en 2010 : le Pr Bey est sollicité par l’Alliance mondiale contre le cancer (AMCC), alors présidée par le Pr Guy de Thé, pour répondre à un problème de santé publique : en Afrique, la prise en charge des enfants atteints de rétinoblastome est quasi-inexistante. "J’avais déjà quelques idées sur le sujet : lorsque j’étais directeur de l’hôpital, nous avions tenté d’organiser une collaboration avec l’Algérie. Ce fut un échec, se souvient Pierre Bey. Mais la réflexion était engagée."

Très vite, il entraîne le Dr Desjardins dans son projet. Leur objectif : former des médecins au diagnostic précoce et au traitement du rétinoblastome dans plusieurs pays d’Afrique. Soutenue par la Fondation Sanofi Espoir et Rétinostop, en complémentarité avec le Groupe Franco-Africain d’Oncologie Pédiatrique, l’AMCC monte un programme sur trois ans au Mali, en République démocratique du Congo (RDC), au Sénégal, en Côte d’Ivoire et à Madagascar. Il y a bien sûr l’achat du matériel nécessaire, mais l’association se concentre surtout sur la formation : spécialisation des ophtalmologistes, diffusion des connaissances en anatomopathologie... Objectif : créer des centres experts, qui seront des référents pour l’ensemble de l’Afrique. C’est là que le Dr Desjardins intervient : "Nous sommes partis à Bamako pour la première fois à l’automne 2011, accompagnés d’un prothésiste, Pascal Sirignano", se souvient le Dr Desjardins. Beaucoup d’enfants étant diagnostiqués tardivement, l’énucléation est souvent nécessaire, ce qui peut provoquer une mise à l’écart de ces enfants si une prothèse n’est pas mise en place.

Trois ans plus tard, le bilan est positif : des praticiens motivés ont été formés, du matériel durable acquis. Bamako, première capitale où le programme a été développé, fait figure d’exemple : le taux de rémission complète pour les formes précoces est passé de 33% en 2011 à 80% aujourd’hui ! "Les équipes ont également appliqué des traitements conservateurs, se réjouit Laurence Desjardins : utilisation du laser, thermo-chimiothérapie mais aussi injections intra-vitréennes de Melphalan, pour les formes bilatérales de rétinoblastome, afin de conserver une vision utile."

Ces bons résultats ont conduit la Fondation Sanofi Espoir à renouveler son soutien pour trois ans à la version malienne de ce programme. En effet, le Mali fait figure de "pays pilote". Mais l’AMCC souhaite poursuivre également les efforts dans les autres pays, où le programme est enclenché. L’association est donc en recherche de fonds pour continuer son programme dans les quatre autres pays.

Parmi les axes de développement du nouveau programme : le diagnostic précoce, qui est la clé d’une amélioration des résultats. "Il a bien été montré à Bamako que si un rétinoblastome est détecté tôt, les chances de guérison sont beaucoup plus élevées et le traitement est moins mutilant, mais aussi beaucoup moins cher." Une étude réalisée pour l’association montre ainsi que le coût de traitement pour un rétinoblastome précoce est de 500 euros avec plus de 90% de chances de guérison, contre 1400 euros pour un cancer de stade avancé avec moins de 10% de chances de guérison. Malgré plusieurs campagnes de communication, les parents continuent pour beaucoup d’amener leurs enfants à l’hôpital très tard. « C’est souvent le dernier recours, souligne le Pr Bey. Elles vont d’abord consulter le tradi-praticien du village, par exemple, et perdent un temps précieux. » Les trois prochaines années s’attacheront donc à communiquer de manière plus efficace auprès de la population. Pour que les enfants d’Afrique aient, un jour, des chances de guérison similaires à celles des petits Français.

En savoir plus

Le site de l’AMCC