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La prise en charge des tumeurs très rares de l’enfant s’harmonise en Europe

12/07/2021
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Dans le cadre du projet européen PARTNER (Paediatric Rare Tumours Network - European Registry), un groupe d’oncopédiatres dirigé par le Dr Daniel Orbach, chef du service clinique d'oncologie pédiatrique, adolescents et jeunes adultes du centre SIREDO de l’Institut Curie, a édité des recommandations diagnostiques et thérapeutiques harmonisées dans toute l’Europe autour de 8 tumeurs très rares. Celles-ci ont été publiées ce mois-ci en libre accès dans Pediatric Blood and Cancer.

Daniel Orbach

Qu’est-ce qu’une tumeur très rare ?

Dr Daniel Orbach : En pédiatrie, toutes les tumeurs peuvent être considérés comme rares. Néanmoins, certaines le sont plus que d’autres. On parle alors de « tumeurs très rares ». Elles concernent environ 2 enfants par million chaque année en France. Mais bien qu’elles soient toutes exceptionnelles, les analyses récentes des registres Européens montrent qu’elles représentent tout de même jusqu’à 11% des tumeurs avant l’âge de 15 ans. Certaines de ces maladies sont spécifiques à l’enfant comme les pleuropneumoblastomes (cancer embryonnaire du poumon) ou les pancréatoblastomes (cancer embryonnaire du pancréas), d’autres peuvent aussi survenir à l’âge adulte comme les corticosurrénalomes, les carcinomes indifférenciées du nasopharynx, les carcinomes des glandes salivaires ou les tumeurs ovariennes des cordons sexuels. Ces dernières sont rares aussi chez l’adulte. Enfin, certaines sont fréquentes chez l’adulte mais rares chez l’enfant comme les mélanomes ou les carcinomes thymiques, par exemple.

Que vont apporter les recommandations récemment publiées ?

En raison de la rareté de ces tumeurs, les oncopédiatres sont souvent démunis, et peu ont l’expérience de ces maladies. Et toujours du fait de leur rareté, il n’existe pas de données scientifiques solides permettant de justifier tel ou tel traitement. Pour les tumeurs qui sont fréquentes chez l’adulte, nous demandons conseils à nos collègues d’oncologie d’adulte. Mais nous pensions pouvoir faire mieux pour le bien des patients.

Le groupe d’oncopédiatres nommé EXPeRT (European Cooperative Study Group for Pediatric Rare Tumors) réunissant des spécialistes de plus de 20 pays différents a donc rédigé ces recommandations originales dans le cadre des réseaux pédiatriques ERN-PEDCAN. Celles-ci s’appuient à la fois sur des études rétrospectives, des études de cas, des avis d’experts et des données obtenues chez l’adulte. Elles sont disponibles en open access depuis juin 2021, et cela durant 3 ans. Toute la communauté mondiale pourra donc y avoir accès, c’est un vrai pas en avant.

Pourquoi était-ce important de travailler à l’échelle européenne ?

Travailler avec nos confrères européens est indispensable. L’expérience des uns et des autres est un savoir essentiel quand il s’agit de soigner des tumeurs qui peuvent toucher parfois à peine 20 enfants en 10 ans dans toute l’Europe. En harmonisant la prise en charge, nous pourrons également évaluer l’efficacité des propositions thérapeutiques et les faire évoluer si besoin au cours du temps. Et pourquoi pas ultérieurement mener des études cliniques sur les plus fréquentes de ces tumeurs rares ?

Ce projet européen vise aussi à mieux connaitre toutes ces tumeurs orphelines. La suite du projet PARTNER consiste à collecter des données cliniques de ces jeunes patients à l’échelle européenne dans une base commune afin de mieux connaitre le devenir de ces enfants, et notamment savoir si les rechutes sont fréquentes.

Ce projet est financé par un appel d’offre européen (3rd Health Programme Call: HP-PJ-06-2016: Rare diseases - support for New Registries. CHAFEA Grant Nr: 777336). La base française des tumeurs rares pédiatriques FRACTURE est soutenue par « SFCE-Imagine for Margo ».

Référence :

The Paediatric Rare Tumours Network ‐ European Registry (PARTNER) Consortium Project: Pediatric Blood & Cancer: Vol 68, No S4 (wiley.com) - https://onlinelibrary.wiley.com/doi/epdf/10.1002/pbc.29119