Actualité - Octobre rose

Un prix Nobel de médecine qui résonne doublement pendant octobre rose

03/10/2016
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Alors que le prix Nobel de médecine vient d’être attribué Yoshinori Ohsumi pour ses recherches sur l’autophagie et que débute octobre Rose, c’est l’occasion de revenir sur les travaux de Fatima Mechta-Grigoriou qui font le lien entre les deux.

Consultations et ponctions, pansements et prélèvements

Thibaut Voisin / Institut Curie

L’autophagie est un phénomène de défense des cellule. En 2014 Fatima Mechta-Grigoriou montrait qu’il favorisait le développement tumoral et empêchait l’action de certaines chimiothérapies chez les femmes atteintes de cancer du sein triple négatif. "Ces cancers du sein sont dénués de récepteurs aux œstrogènes et à la progestérone, et ne sur-expriment pas HER2. Les femmes porteuses de ce type de cancer ne peuvent donc ni bénéficier d’une hormonothérapie, ni de thérapie ciblée anti-HER2 comme Trastuzumab, explique Fatima Mechta-Grigoriou, chef de l’équipe Stress et cancer (U830 Inserm/Institut Curie). Par ailleurs, la moitié des patientes développe une résistance à la chimiothérapie."

Son équipe, en collaboration avec celle de Jacques Camonis (U830 Inserm/Institut Curie), a mis en évidence que l’un des mécanismes dont les cellules disposent pour résister au stress, l’autophagie, était fortement impliqué dans la progression et la résistance à la chimiothérapie dans ce type de cancers du sein. "L’autophagie est un mécanisme d’auto-défense des cellules, qui leur permet de survivre après avoir subi un stress", précise la chercheuse. L’analyse des prélèvements tumoraux de plusieurs cohortes (dont une de l’Institut Curie), leur a permis de montrer que l’une des protéines de ce mécanisme, LCB3, était un marqueur fiable du pronostic tumoral : ainsi, deux sous-groupes de patientes sont identifiés : plus le taux de LCB3 est élevé dans les prélèvements tumoraux, plus le pronostic est défavorable. 

Ensuite les deux post-doctorants, Sylvain Lefort et Carine Joffre, ont étudié, dans des modèles de cultures cellulaires en 3D, l’impact de cette protéine. Alors qu’une faible expression de LCB3 se traduit par une croissance cellulaire très compacte, plus le taux s’élève, plus la masse cellulaire "se relâche" et va jusqu’à prendre la forme d’une étoile. "Ce changement de forme est associé à des capacités invasives beaucoup plus élevées dans ce dernier cas", note la chercheuse. Par ailleurs, l’inhibition de l’autophagie dans des modèles expérimentaux réduit fortement la croissance tumorale. Or la chloroquine, un antipaludéen, est connue pour bloquer l’autophagie. Les chercheurs ont dont voulu savoir quel serait son effet sur leurs modèles expérimentaux pré-cliniques. L’adjonction de chloroquine en complément de certaines chimiothérapies prescrites lors de la prise en charge des femmes atteintes de cancer du sein triple négatif accroît l’efficacité du traitement. "Ainsi, inhiber l’autophagie est une piste thérapeutique intéressante, relativement simple à mettre en place et donc à explorer pour plus de la moitié des patientes triple-négatives", conclut Fatima Mechta-Grigoriou.

Copyright : Thibaut Voisin / Institut Curie

En savoir plus

Inhibition of autophagy as a new means of improving chemotherapy efficiency in high-LC3B triple-negative breast cancers
Sylvain Lefort, Carine Joffre, Yann Kieffer, Anne-Marie Givel, Brigitte Bourachot, Giulia Zago,  Ivan Bieche, Thierry Dubois, Didier Meseure, Anne Vincent-Salomon, Jacques Camonis, Fatima Mechta-Grigoriou
Autophagy, 26 novembre 2014, DOI:10.4161/15548627.2014.981788