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Une équipe de l’Institut Curie découvre comment l’ADN se dézippe au moment de se répliquer

06/01/2023
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Un article publié dans Cell et co-dirigé par Chunlong Chen, chef de l’équipe Programme de réplication du génome et instabilité génomique à l’Institut Curie fait état d’une découverte sans précédent sur la réplication de l’ADN. Elle permet de mieux comprendre comment la vie s’est créée et laisse espérer des avancées en cancérologie.

Illustration_actu_janv_Chenlong

Depuis la découverte de la structure de la double hélice d'ADN en 1953, la façon dont les doubles brins d'ADN se déroulent et se déploient était un mystère non résolu. « Cette fois, nous venons de faire un pas de plus pour comprendre les origines de la vie », explique posément Chunlong Chen, chef de l’équipe Programme de réplication du génome et instabilité génomique à l’Institut Curie (CNRS UMR3244 / Institut Curie / Sorbonne Université). Le chercheur vient de publier, en collaboration avec des biologistes de l’université de Hong Kong (Yuanliang Zhai) et de l’université des sciences et technologies de Hong Kong (Bik-Kwoon Tye et Shangyu Dang), une étude incontournable dans la revue Cell.

Chacune de nos cellules porte en elle deux mètres d’ADN, qu’elle doit répliquer à chaque division cellulaire. Pour cela, il faut que nos 23 paires de chromosomes s’ouvrent et se séparent en deux brins qui serviront de modèle à l’ADN polymérase pour synthétiser les brins complémentaires. Les erreurs dans ce processus sont notamment à l’origine des tumeurs. On savait que chez les eucaryotes (les organismes dont les cellules possèdent un noyau, comme les humains, les animaux, les champignons et les plantes), le mécanisme pour initier la réplication de l’ADN repose sur la famille des gènes MCM2-7. Les MCM2-7 s’assemblent alors pour former un complexe en double héxamère (DH), encerclant l’ADN le long des chromosomes. Cependant ce processus était encore mal compris.

Cette fois, à l’aide d’approches multidisciplinaires, l’équipe a pu observer de façon claire comment le complexe MCM2-7 déstabilise l’ADN, permettant sa première ouverture, précisément à la jonction des deux hexamères.

Il faut imaginer cela comme une fermeture éclair qui sépare les deux bords crantés

Sourit Chunlong Chen.

L'équipe a également découvert que les DH MCM2-7 sont chargés sur l'ADN sur des dizaines de milliers de sites à travers le génome humain, qui s'excluent mutuellement avec les loci de transcription active. Enfin, lorsque cette structure initiale est perturbée, les DH MCM2-7 ne peuvent plus s'assembler sur l'ADN. Impossible alors pour l’ADN de se répliquer.

Cette découverte inédite laisse espérer une nouvelle ère dans les traitements contre le cancer. Pour le moment, les thérapies disponibles, notamment les chimiothérapies, tuent les cellules qui se répliquent sans distinction, qu’elles soient normales ou cancéreuses. Développer de nouveaux traitements ciblés MCM2-7 permettrait de mettre en pause la réplication des cellules normales et de cibler spécifiquement les cellules cancéreuses en cours de division qui seraient alors détruites. Plus largement, cette avancée ajoute une pièce de puzzle à la grande énigme de notre histoire.

Figure public ADN Chunlong Chen

An initial open structure (IOS) is formed upon binding of human MCM double hexamer (hMCM-DH) to origin DNA.

 

Référence

The Human Pre-replication Complex is an Open Complex, Cell, 5 janvier 2023 https://doi.org/10.1016/j.cell.2022.12.008
Li J.*, Dong J.*, Wang W.* (*co-first authors), Yu D., Lee C.S.K., Lam W.H., Alary N., Fan X., Yang Y., Hui Y.C., Zhang Y., Zhao Q., Chen C.L.# (#co-last authors), Bik-Kwoon Tye B.K.#, Dang S.#, Zhai Y.# (2023)