Actualité - ESMO

L'Institut Curie au congrès de l'ESMO 2023

19/10/2023
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Anticorps bispécifiques, nanoparticules, épimédicaments… Les médecins et chercheurs de l’Institut Curie présenteront lors du congrès annuel de la Société Européenne d'Oncologie Médicale (ESMO) les dernières innovations en matière d'oncologie, qui pourront changer la donne pour les patients atteints de cancer.

Congrès ESMO 2023
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Le congrès annuel de la Société Européenne d'Oncologie Médicale (ESMO), se déroule du 20 au 24 octobre 2023 à Madrid. Les médecins et chercheurs de l’Institut Curie seront au rendez-vous de cet évènement incontournable de la recherche européenne en oncologie. Ils y présenteront les dernières avancées cliniques, molécules innovantes et autres traitements inédits qui, dans les années à venir, pourront changer la donne pour les patients atteints de cancer.

Cette édition 2023 du congrès de l’ESMO traduit une nouvelle fois le dynamisme et la qualité des recherches cliniques menées à l’Institut Curie. La combinaison de nos expertises dans certaines localisations avec des recherches d’excellence conduit nos équipes au premier plan européen de l’oncologie, avec des approches toujours plus innovantes et prometteuses pour les patients,

S’enthousiasme le Pr Steven Le Gouill, directeur de l’Ensemble hospitalier de l’Institut Curie.

A retenir

  • Anticorps bispécifiques - De nouvelles stratégies efficaces dans les cancers du poumon rares et le mélanome uvéal métastatique

    - Pour la première fois, un anticorps bispécifique transforme la prise en charge d’une forme rare du cancer du poumon
    - Des résultats sur le long terme confortent l’efficacité d’un anticorps bispécifique pour le traitement du mélanome uvéal métastatique
     
  • Epimédicaments - Vers de nouvelles thérapies anticancéreuses innovantes : les résultats prometteurs de l’association d’un épimédicament et d’une immunothérapie dans les carcinomes épidermoïdes
     
  • Nanoparticules - Une nouvelle étape franchit dans les cancers ORL pour une classe de médicament unique et originale

Anticorps bispécifiques - De nouvelles stratégies efficaces dans le cancer du poumon et le mélanome uvéal

Le principe : Les anticorps bispécifiques sont capables de se lier à deux sites distincts : l’un reconnait un site au niveau des cellules tumorales et l’autre, un second site sur ces cellules ou sur les cellules du système immunitaire. Ces anticorps, en se liant aux deux sites ou sur les deux cellules différentes, leur permettent d’inhiber de façon plus profonde les voies de signalisation intracellulaire ou à deux cellules différentes de se rapprocher pour faciliter alors la destruction des cellules cancéreuses.

Une immunothérapie qui change la donne dans une forme rare du cancer du poumon

Pour la première fois, une étude internationale de phase 3 (PAPILLON) a évalué l’efficacité de l’association d’un anticorps bispécifique, l’amivantamab, avec la chimiothérapie auprès de 308 patients atteints d’un cancer rare du poumon (non à petites cellules avancé avec une mutation rare de l’exon 20 de l’EGFR (Epithelial Growth Factor Receptor).

Les résultats de cette étude seront présentés le samedi 21 octobre 2023 par le Pr Nicolas Girard, pneumo-oncologue, chef du département d’oncologie médicale de l’Institut Curie, coordinateur de l’Institut du thorax Curie-Montsouris et investigateur principal de l’étude PAPILLON.

Communication orale, Presidential - / Samedi 21 octobre (17h47-17h59) - Pr Nicolas Girard.
Amivantamab Plus Chemotherapy vs Chemotherapy as First-line Treatment in EGFR Exon 20 Insertion-mutated Advanced Non-small Cell Lung Cancer (NSCLC): Primary Results From PAPILLON, a Randomized Phase 3 Global Study

Efficacité sur le long terme d’un anticorps bispécifique pour le traitement du mélanome uvéal métastatique

Avec 500 à 600 nouveaux cas par an en France, le mélanome uvéal est le cancer de l’œil le plus fréquent chez l’adulte. Chaque année, l’Institut Curie, centre de référence national et européen, prend en charge environ deux tiers des nouveaux cas de mélanome uvéal en France. Chez un patient sur trois, la maladie se propage sous forme de métastases (le plus souvent hépatiques) et, jusqu’à présent, il n’existait aucune thérapie réellement efficace pour traiter ces métastases.

Or, un anticorps bispécifique, le tebentafusp (Tebe), change la donne pour environ 45% des patients métastatiques (ceux ayant un certain typage tissulaire HLA-A*02:01, nécessaire pour déclencher cette immunité anti-mélanome). En redirigeant les lymphocytes T CD3+ du patient contre la glycoprotéine gp100 exprimée par les cellules de la peau et les cellules tumorales de mélanome, le Tebe stimule une réaction immunitaire ciblée anti- tumorale.

En 2021, les résultats d’une étude internationale randomisée de phase 3 (IMCgp100-202) coordonnée en France par le Dr Sophie Piperno-Neumann, oncologue médicale à l’Institut Curie révélait que le Tebe augmente significativement la survie globale des patients, par comparaison aux traitements existants. Au congrès de l’ESMO 2023, le Dr Sophie Piperno-Neumann présentera une actualisation de ces résultats avec un suivi d’au moins trois ans pour l’ensemble des patients de l’étude. Les données confirment l’avantage du Tebe qui continue à apporter aux patients un bénéfice en survie à long terme (27 % contre 18% avec les traitements existants). Le taux de bénéfice clinique est de 46% versus 27%, et un tiers des patients répondaient toujours au Tebe après 18 mois de traitement. Ces données à long terme montrent également qu’il n’y a pas plus d’effets secondaires ni de toxicité. Par ailleurs, le rôle de l’ADN tumoral circulant (ADNtc) a été évalué comme biomarqueur afin d’identifier les patients qui bénéficient le plus du Tebe. La disparition précoce de l’ADNtc chez 37% des patients est associée à une meilleure survie, y compris chez les patients en progression radiologique.

Les premiers résultats rapportés après 14 mois de suivi en 2021 sont aujourd’hui largement consolidés ; après 43 mois de suivi médian, les données sur le long terme confortent la place en première intention du Tebentafusp, cet anticorps bispécifique, chez les patients HL A02 :01 positifs atteints de mélanome uvéal métastatique

Conclut le Dr Sophie Piperno-Neumann.

A noter également qu’une étude rétrospective en vie réelle menée auprès de 72 patients atteints de mélanome uvéal métastatique et suivis en France, notamment à l’Institut Curie, renforce les résultats de l’étude de phase 3 sur le long terme.

Mini-oral session – Melanoma and other skin tumours – Samedi 21 octobre 2023 (15h10-15h15)
LBA50 - Three-Year Overall Survival with Tebentafusp in Metastatic Uveal Melanoma, New England Journal of Medicine

Jessica C. Hassel, M.D., Sophie Piperno-Neumann et al. ; 21 octobre 2023 - DOI: 10.1056/NEJMoa2304753



Poster session “Melanoma and other skin tumours” - – Dimanche 22 octobre 2023 - Tebentafusp (Tebe) in an ongoing cohort of 72 French patients (pts) with metastatic uveal melanoma (mUM)

Epimédicaments - Vers de nouvelles thérapies anticancéreuses innovantes

Le principe : Les épimédicaments sont des molécules qui agissent sur les mécanismes épigénétiques, à savoir des processus biologiques réversibles qui influent sur l’expression des gènes sans modifier la séquence d’ADN elle-même. Ces molécules sont capables, par exemple, d’inhiber la méthylation de l’ADN ou de cibler des modifications des histones, ces protéines qui entourent l’ADN. Parmi les épimédicaments, le vorinostat est un inhibiteur des histones désacétylases (HDAC), qui, en se liant sur les sites actifs des enzymes HDAC, peut moduler l’épigénome.

Epimédicaments et immunothérapie : des résultats très encourageants dans les cancers épidermoïdes

L’essai clinique PEVO (phase 2, ouvert, non randomisé, multicentrique) vise à évaluer une approche thérapeutique très innovante : l’association d’une immunothérapie (le pembrolizumab) avec un épimédicament, le vorinostat. Il a été mené auprès de 112 patients touchés par un carcinome épidermoïde en récidive dans plusieurs localisations : sphère ORL, poumon, col de l’utérus, vulve, pénis, canal anal.

Les carcinomes épidermoïdes affectent les cellules de la peau et représentent environ 20 % des cancers cutanés. Potentiellement agressifs, ce type de tumeurs cutanées présente des altérations moléculaires similaires qui justifient des stratégies thérapeutiques communes.

Nous avons fait le choix de cette association inédite parce que des données préliminaires indiquaient que l’épimédicament, en modulant l’expression de certains gènes, pouvait améliorer l’efficacité de l’immunothérapie. Nous sommes aujourd’hui très satisfaits car nos résultats révèlent une activité antitumorale tout à fait encourageante, en particulier dans le cancer du canal anal

explique le Pr Christophe Le Tourneau, oncologue médical, chef du département des essais cliniques précoces (D3i) de l'Institut Curie et pilote de l’étude PEVO.

Au congrès de l’ESMO2023, seront présentés les résultats obtenus dans chacune des cinq cohortes. Notamment, l’étude PEVOsq a atteint son critère d'évaluation principal, rapportant une activité antitumorale prometteuse de l'association de l’épimédicament (vorinostat) avec l’immunothérapie chez des patients présentant un carcinome épidermoïde du canal anal. Les résultats ont également révélé une activité antitumorale encourageante chez les patients atteints de cancers épidermoïde ORL, de même que dans le cancer du col de l’utérus. L’efficacité est également encourageante chez les patientes avec un cancer de la vulve.

Mini Oral presentation - Gastrointestinal tumours, lower digestive - Dimanche 22 octobre 2023 - Phase II trial evaluating the efficacy of pembrolizumab combined with vorinostat in patients with recurrent and/or metastatic anal squamous cell carcinoma – subgroup analysis of the PEVOsq basket trial. C. Coutzac, F. Bigot, D. Vansteene, M. Dos Santos, F. Ghiringhelli, B. You, A.Lambert, C. Gomez-Roca, C. Abdeddaim, C. Neuzillet, E. Jeannot, E.Guerini Rocco, G. Frige, L. Mazzarella, C. Dupain,  M. Kamal, F. Legrand, M. Jimenez, T. Filleron, C. Le Tourneau.

4 posters presentations : Phase II trial evaluating the efficacy of pembrolizumab combined with vorinostat in patients with recurrent and/or metastatic head & neck squamous cell carcinoma / squamous cell cervix carcinoma / vulvar and vaginal squamous cell carcinoma / penis squamous cell – subgroup analysis of the PEVOsq basket trial.

Nanoparticules - Une nouvelle étape franchie dans les cancers ORL pour une classe de médicament unique et originale

Le principe : Des nanoparticules métalliques d’hafnium (dénommées NBTXR3) sont injectées directement dans la tumeur et permettent de démultiplier l’effet antitumoral de la radiothérapie. En interagissant avec l’hafnium, les rayons génèrent neuf fois plus de radicaux libres que lors de la radiothérapie « normale ». Ces derniers détruisent les cellules tumorales, sans atteindre les tissus avoisinants.

Des résultats très probants dans les cancers ORL et une étude de phase 3 en cours

De nombreux patients atteints de cancer ORL, du fait de leur âge avancé et de comorbidités, ne tolèrent pas le traitement standard par chimiothérapie. C’est pourquoi, le développement d’alternatives thérapeutiques adaptées à cette population fragile est nécessaire. C’est dans ce contexte que le traitement avec des nanoparticules chez ces patients est apparue comme une nouvelle option thérapeutique inédite.

Une première étude de phase 1, multicentrique, a été menée auprès de patients atteints de cancers ORL localement avancé et non éligible à la chimiothérapie. Cette étude dite « d’escalade de dose » a permis d’établir un profil de tolérance sans toxicité et de déterminer la bonne dose de nanoparticules à injecter au bloc opératoire dans la tumeur. Une seconde partie de l’étude « d’expansion de dose » a été menée auprès de 56 patients recrutés dans 20 centres en Europe ayant tous reçu la même dose de nanoparticules.

Présentés à l’ESMO 2023, les résultats obtenus sont encourageants : ils révèlent que le traitement est bien toléré et que l’efficacité antitumorale est durable. Chez 44 patients, une réponse a été obtenue dans la lésion injectée chez 81,8 % des patients dont 63,6 % de réponse complète. Dans l’ensemble de lésions, le taux global de réponse était similaire, 79,5%. Le taux de réponse complète était de 52,3%. La médiane de survie globale était de 23,1 mois chez ces patients (contre 12 mois). Ces résultats confortent le traitement qui est actuellement testé chez des patients âgés atteints de cancer ORL avancé dans le cadre de l’étude internationale de phase 3 en cours de (NANORAY-312).

Depuis plus de 10 ans, l’Institut Curie travaille sur cette thérapie extrêmement originale avec la société Nanobiotix, qui a développé ces nanoparticules NBTXR3. Des résultats positifs ont déjà été montrés dans le sarcome et aujourd’hui, avec de nouveaux résultats très prometteurs dans les cancers ORL, le potentiel thérapeutique de cette stratégie tout à faire inédite est confortéNous sommes désormais impatients de recueillir les premières données de l’étude de phase 3 NANORAY-312 qui a démarré au niveau international

se réjouit le Pr Christophe Le Tourneau, oncologue médical, chef du département des essais cliniques précoces (D3i) de l'Institut Curie et investigateur principal de l’étude.

Poster presentation session “Head and neck cancers, excl. thyroid” – Dimanche 22 octobre 2023 - Antitumor Activity of the Radioenhancer NBTXR3 on Injected Lesions to Estimate Overall Survival: Exploratory Analyses from a Phase I in Cisplatin-Ineligible Locally Advanced HNSCC Patients. Christophe Le Tourneau, (…) Maria Lesnik

Focus sur la recherche translationnelle - Mieux appréhender l’hétérogénéité des tumeurs et explorer l’utilité clinique des biopsies liquides : application dans les cancers ORL

Existe-t-il une association entre le niveau d’hétérogénéité d’un cancer ORL et le risque de récidive ? La détection de l’ADN tumoral dans le sang circulant permet-elle d’identifier les patients opérés à risque de rechute ? En utilisant les données de l’étude SCANDARE, le Dr Grégoire Marret, oncologue médical dans le département des essais cliniques précoces de l’Institut Curie (D3i), a réalisé plusieurs analyses de la cohorte des patients avec un cancer ORL. SCANDARE est une étude prospective de recueil d’échantillons tumoraux et sanguins destinés à la recherche translationnelle dans les cancers de l’ovaire, les cancers du sein triple négatif et les cancers ORL. Ses objectifs visent à mieux comprendre l’hétérogénéité de ces tumeurs, le rôle de l’environnement immunitaire et à caractériser des biomarqueurs de sensibilité et de résistance aux médicaments anticancéreux.

► Une première analyse montre que chez 63 % de patients initialement opérés pour un cancer ORL localisé, la détection dans le sang circulant de l’ADN tumoral au cours de la surveillance permettait d’anticiper une récidive clinique d’environ 10 mois. Ces résultats posent la question de l’intérêt d’un traitement complémentaire postopératoire guidé par la détection de l’ADN tumoral circulant.
► En étudiant des coupes histologiques de tumeurs ORL, l’hétérogénéité intra-tumorale a pu être quantifiée et corrélée au risque de récidive. L’annotation de ces régions hétérogènes par un pathologiste a permis dans un second temps de guider les analyses moléculaires de manière à appréhender une hétérogénéité au niveau génétique. Cette approche de séquençage multirégional guidée par relecture pathologique n’a encore jamais été rapporté dans ces tumeurs.

Deux posters presentations
session “Head and neck cancers, excl. thyroid” – Dimanche 22 octobre 2023
► Prognostic value of pathological intratumor heterogeneity in patients with head and neck squamous cell carcinoma treated with upfront surgery
► Serial cell-free tumor DNA in prognosing survival in patients with head and neck squamous cell carcinoma treated with upfront surgery

 

Au programme des educationnal et special sessions de l’ESMO 2023 :

► La Pre Anne Vincent-Salomon, cheffe du service de pathologie à l’Institut Curie, directrice de l’Institut des cancers des femmes, co-présidera une session spéciale dédiée à l’intelligence artificielle dans le pronostic du cancer, et interviendra pour une présentation dédiée au cancer du sein : quels usages de l’IA en pathologie pour le diagnostic et le pronostic du cancer du sein, quels outils sont actuellement disponibles ? Quelles sont les perspectives et quels biais de ces nouveaux usages ?
Artificial Intelligence in prognostication – 23 octobre de 14h45 à 16h15

► Le Dr Etienne Brain, oncologue médical à l'Institut Curie, présidera quant à lui une session spéciale dédiée à l’onco-gériatrie, pendant laquelle il interviendra précisément sur l’optimisation de la prise en charge des patientes âgées atteintes d'un cancer du sein avancé ; intégrant ces patientes aux essais cliniques en sachant adapter pour leur donner un vrai accès à l’innovation.
In collaboration with SIOG (International Society of Geriatric Oncology): Fundamentals in geriatric oncology in clinical practice – 20 octobre de 14h à 15h30

► Le Dr Emanuela Romano, oncologue médicale, directrice médicale du Centre d'Immunothérapie des cancers de l’Institut Curie présidera 2 sessions spéciales :
- ESMO Clinical Practice Guidelines 1 – 22 octobre de 10h15 à 11h45
- ESMO Clinical Practice Guidelines 2 – 22 octobre de 14h45 à 16h15


► La Pre Sylvie Bonvalot, chirurgienne oncologue, spécialiste des sarcomes des tissus mous à l'Institut Curie, interviendra lors d’une session dédiée aux prédispositions génétiques aux sarcomes : « Comment traiter les patients atteints de sarcomes osseux, de sarcomes des tissus mous et de GIST (tumeurs stromales gastro-intestinales) présentant une prédisposition héréditaire : Le point de vue d'un chirurgien »
Educational session - Genetic predisposition in patients with sarcoma – 23 octobre de14h45 à 16h1

► Le Pr Nicolas Girard, chef du département d’oncologie médicale de l’Institut Curie et coordinateur de l’Institut du Thorax Curie-Montsouris, interviendra sur les biomarqueurs prédictifs pour l’immunothérapie adjuvante/néoadjuvante dans le cancer du poumon non à petites cellules.
Educational session - Adjuvant / neoadjuvant therapy of operable NSCLC in 2023 – 23 octobre de 16h30 à 18h