Actualité - Publication

Des macrophages bénéfiques dans le cancer du sein

25/03/2022
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Contrairement au consensus actuel, la présence de macrophages autour d’un cancer du sein n’est pas forcément un mauvais signe, d’après les travaux menés par l’équipe "Immunothérapie Translationnelle" d’Eliane Piaggio à l’Institut Curie. Les biologistes révèlent une sous population de ces cellules immunitaires qui aident à lutter contre le cancer. Ces résultats sont publiés dans la revue Cell le 23 mars 2022.

Immunofluorescence sur une tumeur mammaire

Immunofluorescence on a breast tumor. In green, the tumor cells expressing cytokeratin form islets. In white, the macrophages are distributed outside the islets. In blue, the nucleus of all the other…

Ces dernières années, la recherche a découvert combien le système immunitaire est important dans le cancer du sein. Inhibé par l’environnement tumoral, il laisse la tumeur grossir. Actif, il entrave son développement. Dans ces processus, le rôle des macrophages, des cellules immunitaires installées dans les tissus, reste à élucider. Les spécialistes les considèrent généralement comme un mauvais signe. Mais les travaux de chercheurs de l’Institut Curie dessinent un tableau plus complexe. Ils montrent qu’une sous population de macrophage pourrait être ciblée par des traitements afin d’aider le système immunitaire à lutter contre la tumeur.

Dans une étude parue dans Cell, Julie Helft, Rodrigo Nalio Ramos et Eliane Piaggio, de l’équipe Immunothérapie Translationnelle au sein de l’Unité Immunité et Cancer (U932, Institut Curie, Inserm), en collaboration avec les services de pathologie et de chirurgie de l’Ensemble hospitalier de l’Institut Curie et avec d’autres laboratoires européens, ont étudié les macrophages présents dans les tumeurs de patientes souffrant de cancer du sein de type luminal, c’est-à-dire la forme la plus fréquente. Grâce à une analyse en cellule unique, les biologistes ont distingué deux populations de macrophages. « L’une est située plutôt proche des cellules cancéreuses tandis que la seconde est un peu en périphérie du cancer », décrivent-ils. Les données cliniques et biologiques de près de 80 patientes[1], suivies à l’Institut Curie, montrent que la première est associée à un pronostic défavorable et la seconde à une meilleure survie. Tous les macrophages infiltrés ne se valent donc pas, certains sont bénéfiques et d’autres non. « Cela s’oppose au dogme établi ! On ne s’y attendait pas », expliquent les chercheurs.

Pour comprendre ce phénomène, les chercheurs ont mené des études in-vitro sur des cellules animales. « Nous avons démontré in vitro que les macrophages bénéfiques activent des cellules effectrices du système immunitaire ». Les chercheurs pensent ainsi que ces macrophages, cellules résidentes des tissus sains, constituent la première ligne de défense lorsque la tumeur commence à se former. Puis si le cancer se développe, ils sont dilués par l’arrivée d’un autre type de macrophages. Ces derniers faciliteraient la croissance tumorale en cherchant à inhiber les réponses immunitaires.

Il serait intéressant de quantifier et caractériser les différentes sous-populations de macrophage pour connaitre le pronostic des patientes et anticiper leurs réponses aux traitements,

estime Julie Helft qui a dirigé le projet et qui est aujourd’hui cheffe d’équipe à l’Institut Cochin.

Elle va poursuivre sa collaboration avec l’équipe menée par Eliane Piaggio au sein du Centre de recherche de l’Institut Curie et imagine déjà comment cibler ces cellules pour développer des traitements qui améliorent la réponse immunitaire des patientes, en complément des immunothérapies actuelles.

Référence :

Tissue-resident FOLR2+ macrophages associate with CD8+ T cell infiltration in human breast cancer. Rodrigo Nalio Ramos, Yoann Missolo-Koussou, Yohan Gerber-Ferder, Pierre Guermonprez, Eliane Piaggio, Julie Helft. 23 mars 2022. Cell Doi https://doi.org/10.1016/j.cell.2022.02.021

 

[1] Le recueil de l’ensemble de ces données est réalisé dans le respect de la réglementation en vigueur, notamment le Règlement relatif à la protection des données personnelles (RGPD) et la « Loi Informatique et Libertés ».