Actualité - Publication

Manipuler les chromosomes dans une cellule vivante révèle qu’ils sont fluides

29/07/2022
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Des scientifiques du CNRS, de l’Institut Curie, et de Sorbonne Université ont pu, pour la première fois, physiquement manipuler des chromosomes de cellules vivantes. En soumettant les chromosomes à différentes forces, à l’aide d’aimants, ils ont découvert que les chromosomes sont en réalité très fluides, presque liquides en dehors des phases de division de la cellule. Cette étude est publiée dans Science, le 29 juillet 2022.

Fluidité des chromosomes

Vue artistique de la manipulation mécanique d'un chromosome.

Les chromosomes sont fluides, presque liquides, hors périodes de division. C’est ce que viennent de démontrer des scientifiques des laboratoires Dynamique du Noyau (Institut Curie/Sorbonne Université/CNRS), Physico-Chimie Curie (Institut Curie/Sorbonne Université/CNRS) et Biologie Cellulaire et Cancer (Institut Curie/Sorbonne Université/CNRS)1, en collaboration avec des scientifiques du MIT. Une découverte rendue possible grâce à la manipulation mécanique directe, pour la toute première fois, de chromosomes contenus dans le noyau de cellules vivantes.

Jusqu’alors, les chromosomes, très longues molécules d’ADN, étaient représentés comme emmêlés, tels des pelotes de laine, et formant une sorte de gel. Les observations de cette nouvelle publication en donnent donc une image différente. Fluide, capable de se mouvoir librement, le chromosome n’est pas contraint par les autres éléments présents dans le noyau, et est capable de se réorganiser.

Pour parvenir à ces conclusions publiées dans Science, les scientifiques ont fixé des nanoparticules magnétiques à une petite portion de chromosome d’une cellule vivante. Ils ont ensuite étiré le chromosome, et exercé sur lui différentes intensités de forces, grâce à l’attraction d’un autre micro aimant. Par cette approche, les équipes sont parvenues, pour la toute première fois dans une cellule vivante, à mesurer la réponse d’un chromosome à des forces extérieures.

Grâce à ces expériences, les chercheurs et chercheuses ont pu observer que l’échelle des forces naturellement exercées dans le noyau, par exemple par des enzymes répliquant l’ADN, est suffisante pour rendre le chromosome fluide. Cette découverte majeure, à l’interface de la physique et de la biologie, change la représentation jusqu’ici établie du chromosome. Elle apporte également de nouveaux éléments de compréhension sur les processus biologiques, sur la biophysique du chromosome et sur l’organisation du génome.

Grâce à vos dons

Les travaux menés par les chercheurs de l’Institut Curie qui ont permis d’aboutir à cette découverte ont été rendus possible grâce à la générosité des donateurs et au modèle mis en place à l’institut pour soutenir la création de nouvelles équipes de recherche.

 

Publication :

Live-cell micromanipulation of a genomic locus reveals interphase chromatin mechanics. Veer I. P. Keizer, Simon Grosse-Holz, Maxime Woringer, Laura Zambon, Koceila Aizel, Maud Bongaerts, Fanny Delille, Lorena Kolar-Znika, Vittore F. Scolari, Sebastian Hoffmann, Edward J. Banigan, Leonid A. Mirny, Maxime Dahan,Daniele Fachinetti, Antoine Coulon. Science, 29 juillet 2022.  DOI : 10.1126/science.abi9810

► Voir la publication

1. Cette étude a été menée par trois équipes de recherches en France, dont celle de Maxime Dahan (UMR168), décédé en 2018. Il a joué un rôle majeur dans l’élaboration de ce projet.