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Morphogenèse : quand génétique et mécanique œuvrent ensemble

13/03/2023

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La distribution spatiale des cellules au cours du développement embryonnaire d'un organisme (morphogenèse) est affectée dans de nombreuses pathologies comme le cancer. Yohanns Bellaïche et son équipe Polarité, division et morphogenèse du Centre de recherche de l’Institut Curie, en collaboration avec un laboratoire de l’université Paris Cité, viennent de mettre en lumière un nouveau mécanisme associant la courbure du tissu et sa tension, le tout piloté par la génétique. Leurs résultats viennent d’être publiés dans la revue Nature Communications.

Tout au long du développement d’un organisme pluricellulaire, les tissus se forment adoptant une morphologie propre à la future fonction de l’organe qu’ils vont constituer au sein de l’organisme vivant. Cette morphologie est une propriété évidente et fondamentale des systèmes biologiques impliquant la fonction des organes et des tissus. La façon dont la tension et les propriétés mécaniques des tissus entraînent des changements de forme commence à être bien connue, mais la question de savoir si une géométrie tissulaire donnée influence la morphogenèse ultérieure et comment cela se produit se pose encore. C’est pour y répondre que l’équipe Polarité, division et morphogenèse, sous la direction de Yohanns Bellaïche, directeur adjoint de l’unité Génétique et biologie du développement (CNRS UMR3215 / Inserm U934 / Sorbonne université) à l’Institut Curie a étudié ce processus en étroite collaboration avec François Graner physicien au laboratoire Matière et systèmes Complexes à l’Université Paris Cité.

Nous avons exploré comment la courbure, un indicateur-clé de la géométrie des tissus, joue sur la dynamique de l'invagination des tissus épithéliaux. Nous avons ainsi découvert des éléments-clés pour notre compréhension de la formation des organes en trois dimensions

Explique le chef d’équipe.

Ces travaux révèlent un mécanisme simple et robuste couplant génétique et mécanique. Si l’on prend l’exemple d’un câble sous tension. S'il est droit, sa tension ne crée aucune force sur le côté ; s'il est courbé, elle a pour effet d'engendrer une force vers l'intérieur de la courbure. A l’identique, chez la drosophile, au stade intermédiaire entre la larve et l’adulte, un câble fait de moteurs moléculaires se forme au futur emplacement de son cou. Et la courbure de ce câble, couplée à sa tension, fait se contracter le tissu de manière à former un cou étroit.

Au travers de la biologie et de la physique, notre étude interdisciplinaire de la courbure a permis d’en savoir plus sur le rôle de la géométrie des tissus et sur les liens entre géométrie, organisation de l'actomyosine et tension épithéliale.

Reprend le biologiste Yohanns Bellaïche.

Pour tester ce mécanisme physique encore théorique, l’équipe a modifié, par la génétique ou par la manipulation directe, tant la courbure que la tension. Elle a ainsi pu vérifier qu'un mécanisme physique est bien à l'œuvre à cette étape. Les biologistes ont également identifié les gènes contrôlant la localisation du câble et sa tension et décrit le lien existant entre les forces mécaniques et les gènes en cause - dits "homéotiques" -. Ces derniers sont communs à nombre d’animaux et aux humains.

La courbure étant une propriété des tissus sains ou pathologiques, l’exploration de son rôle dans des contextes tumoraux pourrait permettre de mieux comprendre comme les tissus se déforment lors de pathologies.

Soutien de l’ANR
L’ensemble de ces travaux bénéficient d’un financement de l’Agence nationale de la recherche (ANR) obtenu en 2018, pour lequel l’équipe s’est fixé de mieux comprendre comment les formes des tissues épithéliaux sont contrôlés dans l’espace.

Homeotic compartment curvature and tension control spatiotemporal folding dynamics
Aurélien Villedieu, Lale Alpar, Isabelle Gaugue, Amina Joudat, François Graner, Floris Bosveld, Yohanns Bellaïche, Nature Communications, 3 février 2023

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