Portrait - Amandine Trouchet, responsable de la future plateforme Single cell

10/12/2018
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En mars 2018, Amandine Trouchet a rejoint l’Institut Curie avec pour objectif assigné principal : concevoir, monter et mettre en œuvre la première plateforme française d’analyse sur cellule unique (Single Cell) dédiée au cancer. L’été 2018 restera l’étape mémorable de la livraison des éléments constitutifs de cette plateforme.

Amandine Trouchet

« La microfluidique en gouttes, c’est l’avenir des analyses biologiques » s’enthousiasme Amandine Trouchet. Ingénieure, puis PhD depuis 2016, les gouttes ont manqué à cette jeune scientifique alors qu’elle amplifiait les informations génétiques (technique de la PCR) de bactéries chez un industriel. Elle a alors postulé à l’appel à candidature que l’Institut Curie lançait pour soutenir son projet Single Cell (pour Cellule unique). « Pendant ma thèse au laboratoire de biochimie de l’ESPCI Paris, j’ai appris à monter une station similaire à celle que nous allons monter à l’Institut Curie, explique-t-elle. Puis j’y ai conçu en collaboration avec une entreprise, un prototype de génération de gouttes, en mallette en vue d’une industrialisation. » Il s’agissait encore de gouttes ! L’objectif était de rendre accessible à un chercheur la technologie qui est, somme toute, complexe.

Réussir à décrypter chaque cellule pour décider quel médicament ciblé donner

La microfluidique est la science et la technologie manipulant des fluides dans des systèmes dont au moins une des dimensions est de l’ordre du micromètre (un millième de millimètre). A l’Institut Curie, les techniques de microfluidique sont bien maîtrisées par notamment l’équipe de Jean-Louis Viovy (CNR) installée à l’Institut Pierre-Gilles de Gennes (IPGG). C'est d'ailleurs sur le plateau technologique de l'IPGG que toute les étapes de micro fabrication des puces microfluidiques sont réalisées.

« C’est un domaine émergent, reprend Amandine Trouchet, responsable de la nouvelle plateforme dédiée. Je suis persuadée que c’est une mine d’or pour la recherche. Certes il y a beaucoup de choses à faire ! Cette technologie est à la croisée de la physique, de la chimie et de la biologie, reprend la spécialiste. Nous plaçons beaucoup d’espoir dans les résultats que nous en tirerons au bénéfice des thérapies ciblées. »

Dès 2016, l’Institut Curie s’est doté d’un premier appareil. « Mais il ne permettait pas d’intervenir sur le protocole, et chaque kit coûtant cher, l’institut a souhaité passer au niveau supérieur. » explique Amandine Trouchet. « Puis, a été mise en œuvre à Curie la technologie plus modulable qu’est la technique de RNAseq (pour l’étude d’ARN). » Avec elle, les chercheurs peuvent adapter certains paramètres du protocole d’analyse.

Actuellement, Amandine Trouchet assure l’expertise technique de deux projets basés sur cette technologie. « J’accompagne l’équipe d’Olivier Lantz (chef de l’Equipe lymphocytes CD4+, lymphocytes T innés et cancer), détaille-t-elle, qui souhaite étudier l‘infiltration de tumeurs dans les lymphocytes T du système immunitaire en fonction de leurs récepteurs et de leurs marqueurs génétiques. Le second projet est porté par Leïla Perié, cheffe de l’Equipe approches quantitatives en immuno-hématologie. Elle souhaite suivre ce que deviennent, de génération en génération, les cellules souches qui se différencient en cellules sanguines et cellules immunitaires. »

Maîtriser tous les paramètres du protocole d’analyse

L’actualité ? « Indéniablement, la livraison des appareils commandés les premiers jours de mon arrivée ! » s’exclame la scientifique. C’est la raison principale de mon recrutement : la mise en place d’une plateforme d’analyse génomique à l’échelle de la cellule unique ou scOMIC. En compléments des technologies déjà présentes, la -future- plateforme de microfluidique évolutive est à l’image de celle conçue par nos voisins, l’Ecole supérieure de physique et chimie industrielle (ESPCI). « La plateforme microfluidique évolutive permettra d’adapter un grand nombre de paramètres. En changeant les circuits microfluidiques, il est possible de changer la taille des gouttes (entre 2 pL et 1nL). Nous pourrons aussi produire nos billes d’hydrogel porteuses des barre-codes et de manipuler les gouttes. Les gouttes créées peuvent subir une série de manipulations. La composition d’une goutte peut être modifiée par fusion active (par l’application d’un champ électrique) avec une autre goutte. La division, le tri selon la fluorescence, l’incubation de gouttes sont aussi possibles. »

Un plus, rendu possible grâce à la générosité du public, pour porter des projets d’envergure en toute autonomie dans un domaine émergent même si les appareils ne prennent pas beaucoup de place (1,5 m2). Le projet scientifique qui inaugurera à l’institut cette technologie est celui de Céline Vallot, cheffe de l’Equipe dynamique de la plasticité épigénétique dans le cancer. Il porte sur l’étude des altérations épigénétiques au cours de la tumorigénèse en relation avec leur phénotype tumoral via l’analyse de l’ADN de la chromatine.

2,2 M€
d’investissement financé notamment par la Campagne MC21 lancée auprès de donateurs et mécènes de l’Institut Curie
1,7 M€
pour l’aménagement de la plateforme Single Cell (phase 1)
0,5 M€
pour l’installation des équipes et le lancement des projets scientifiques (phase 2)